Le capitalisme des «modernes» et celui des «anciens»

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Pour lui, cette proposition sur les «entreprises à mission» constituera un élément distinctif dans son opposition au gouvernement caquiste. Elle lui permettra, en tout cas dans son discours, d’opposer le monde des anciens à celui des modernes.

Le Parti libéral du Québec explique et rappelle que les entreprises à mission se distinguent des corporations «traditionnelles» parce qu’elles poursuivent des objectifs sociaux et environnementaux (des «missions») — tout en demeurant à but lucratif. Souvent appelées Benefit Corporations, elles ont vu le jour il y a une dizaine d’années et existent aujourd’hui dans près de quarante États américains, ainsi qu’en Colombie-Britannique et en Nouvelle-Écosse.

Ces entreprises à mission se situeront au cœur de la «nouvelle vision économique» que défendra le Parti libéral du Québec au cours des prochains mois. À la fin de la dernière session parlementaire, l’ex-ministre des Finances Carlos Leitão l’a en quelque sorte mise sur la table en présentant le projet de loi 797, qui vise à permettre leur création.

Sur le plan économique, le rôle d’un gouvernement est de favoriser des entreprises qui, évidemment, génèrent des profits, mais qui, également, «s’occupent de notre monde, s’occupent de notre planète», estime la cheffe libérale Dominique Anglade.

Ces entreprises à mission s’engagent, dans leurs statuts constitutifs, à exercer leurs activités de façon responsable, à promouvoir un ou plusieurs objectifs sociaux dûment identifiés.

Elles formeraient une sorte de capitalisme responsable. Ce serait des entreprises avec une conscience. C’est ainsi qu’elles sont souvent présentées.

Sur le plan politique, le projet de loi 797 indiquerait la volonté des libéraux de promouvoir une économie «moderne, basée sur le progrès économique, environnemental et social». C’est le credo que veut et voudra brandir le PLQ d’ici les prochaines élections. Entendu que pour lui, sur ce terrain économique, son principal adversaire, le gouvernement de la CAQ, serait... conservateur et passéiste.

Entre de vrais et de soi-disant

Depuis les dernières élections générales, Québec solidaire s’est professionnalisé. L’arrivée de Gabriel Nadeau-Dubois au poste de chef parlementaire à la rentrée constituera l’un des symboles de cette professionnalisation politique.

Le Parti québécois, lui, depuis que Paul St-Pierre Plamondon le dirige, est revenu à ses fondamentaux : la défense de la langue française et l’indépendance du Québec. Aussi, il continue de hisser le plus haut possible sa voile sur tous les «débats» dits identitaires qui pointent leur nez dans l’espace politico-médiatique. Il veut profiter du vent partout où il en perçoit.

Pendant ce temps, le Parti libéral de Dominique Anglade tente d’opérer une mue générale. On l’a noté sur la question de la langue française, où la formation a effectué sa petite révolution plus tôt cette année — bien qu’à son échelle.

Il faut aussi maintenant relever sa volonté de se distinguer sur des questions liées à l’économie. C’est sur ce terrain que ce parti espère prendre du mieux un jour, puisqu’il sait qu’il ne pourra rivaliser ni avec le gouvernement Legault ni avec le Parti québécois sur les sujets identitaires — ceux qui lui ont fait le plus de tort dans l’électorat québécois francophone depuis 10 ans.

Sur le plan économique, entre la CAQ et le PLQ, on aura donc droit à la rentrée d’automne à un débat entre de vrais ou de soi-disant modernes et de vrais ou de soi-disant conservateurs.

C’est en tout cas le terrain sur lequel les libéraux voudraient emmener leurs principaux adversaires.